24 aout 1572 : Le massacre de la ST Barthélémy 1/2
Le massacre de la ST Barthélémy 1/2
Les guerres de Religion
Le protestantisme s’est introduit en France sous la forme du calvinisme. Les premières Églises réformées sont constituées en 1559. Mais, à cette date, la monarchie a depuis longtemps fait son choix : le protestantisme, depuis l’affaire des Placards en 1534, est combattu par François 1er (1515-1547) puis surtout par Henri II (1547-1559).
Les guerres de Religion ensanglantent la France de 1562 à 1598.
La Saint-Barthélemy en est un des épisodes les plus dramatiquement marquants, mais tout au long de ces 36 ans, les violences, les attentats, les assassinats et les massacres n’ont pas cessé, d’un côté ou de l’autre.
La raison de ces massacres est un conflit ancien qui oppose, en France comme dans le reste de l’Europe, les chrétiens restés fidèles au pape à ceux qui ont pris le parti de la Réforme : les catholiques contre les
« huguenots », comme on appelle les protestants de la France en 1572.
Les premières guerres de Religion (1562-1574)
C’est le massacre des protestants à Wassy, le 1er mars 1562, qui déclenche la première guerre de Religion. Ce jour-là, ayant appris que quelques 500 protestants célèbrent leur culte dans une grange près de la ville de Wassy, le duc François de Guise se rend à la grange, où ses hommes, répondant aux jets de pierres des huguenots par des coups d’arquebuse, tuent 23 protestants et en blessent une centaine.
L’événement fait prendre les armes aux protestants, et, dès lors, la guerre fait rage, coupée de trêves plus ou moins importantes, mais toujours provisoires : les années 1570-1572 constituent l’une de ces trêves, préludant au grand massacre de la Saint-Barthélemy.
Mais pourquoi ce carnage ? Les origines du drame, état de la France avant 1572.
Depuis l'apparition des mouvements calvinistes, la France vivait perpétuellement dans les tensions religieuses. Les protestants exigeaient des droits comparables aux catholiques pour exercer librement leur religion, tandis que les vitupérations des curés excitaient les haines du peuple catholique.
À Henri II mort accidentellement en 1559, avaient succédé ses deux premiers fils bien trop immatures. Le pouvoir réel était disputé entre les principaux conseillers du roi : les Guise, catholiques intransigeants, pratiquement maîtres du pouvoir sous François II, la reine-mère Catherine de Médicis qui devint influente sous Charles IX, et Coligny, protestant ambitieux qui su développer une relation d'amitié avec le jeune Charles IX, devenant ainsi dangereusement influent.
A cela s'ajoutaient aussi les gesticulations d'autres grandes familles, en particulier Bourbons et Montmorency, ce qui avait conduit le royaume à une série de guerres de religion, dès 1562.
Pourtant Catherine de Médicis n'avait jamais eu de haine contre les protestants et elle pensa longtemps possible la coexistence pacifique des deux religions.
Depuis le traité de Saint-Germain en 1570, la paix, bien que "boiteuse et mal assise", était à peu près revenue et c'est pour la sceller qu'elle entreprit le mariage de sa fille Marguerite avec le jeune prince protestant Henri de Navarre. Il devait avoir lieu le 18 août 1572.
L’occasion : l’attentat manqué contre Coligny
Comme les persécutions ne suffisent pas à endiguer les progrès de la Réforme, le conflit religieux débouche sur un conflit civil : à partir de 1562, la France sombre dans les guerres de Religion.
L’affaiblissement du pouvoir royal, après le règne d’Henri Il, favorise encore ce déchaînement des haines entre les citoyens : le successeur immédiat d’Henri, François II (1559-1560), n’a que quinze ans quand il monte sur le trône, et il meurt après quelques mois de règne. Son frère Charles IX (1560-1574) lui succède : mais il n’est aussi qu’un enfant (il est né en 1550), et la réalité du pouvoir est exercée par la régente, la reine mère Catherine de Médicis.
Mais ce conflit religieux se trouve exaspéré, au début des années 1570, par la situation intérieure et extérieure du royaume : la question de la guerre qu’il faut ou non mener contre l’Espagne, puissance catholique mais rivale de la France, et aux prises, alors, à la révolte des Pays-Bas protestants ; en effet, Philippe II d’Espagne n’a qu’une crainte, c’est que les Français des deux confessions, désormais réunis, n’entrent en campagne contre lui.
Par ailleurs, existent également des dissensions au sein de la famille royale, entre la mère du roi, acquise aux catholiques, et Charles IX dominé depuis 1570 par un protestant, l’amiral Gaspard de Coligny, ce dernier qui a fait son retour à la Cour à la faveur de la paix, milite pour l’intervention du roi de France aux Pays-Bas, où les protestants ont pris les armes.
Le 22 août, une tentative manquée d’assassinat contre l’amiral de Coligny fait éclater la crise.
Vers 11 heures du matin, ce jour-là, Coligny quitte le Louvre, où il était allé voir le Roi jouer au jeu de paume. Revenant à pied vers son hôtel rue de Bethisy (actuellement au 144 rue de Rivoli), entouré d'une quinzaine de fidèles, en marchant, il se baissa pour renouer le ruban défait de son soulier ; tout à coup, une balle tirée par une arquebuse le blessa à la main ; elle est tirée de la demeure d’un catholique « Maurevert », un gentilhomme proche des Guises.
Il est donc probable que ceux-ci était les commanditaires de l'attentat.
Il est aussi probable que Catherine de Médicis ait été au courant, surtout qu'elle ne manifesta pas de surprise lorsqu'on lui apprit la nouvelle.
Le roi se rendit au chevet de son conseiller qui l’adjura de ne pas chercher à le venger !
Le 23 août 1572, le roi Charles IX, à la suite de l’attentat raté : « Il est à craindre que le peuple, qui déjà est en émoi, ne fit quelque sédition, ou bien qu’en une ville enragée et turbulente comme celle-là, il se fit quelque tumulte. »
L’attentat manqué risque de mettre fin à la paix civile qui règne depuis 1570 (en fait depuis la venue au pouvoir de Coligny et depuis le traité de Saint-Germain, qui, pour la première fois, a accordé aux protestants la liberté de conscience, de culte et de prédication).
Charles IX, furieux, demanda aussitôt une enquête, d'autant plus que la noblesse protestante réclamait justice. L'enquête progressait rapidement et se rapprochait des Guise et même du frère du roi, Henri d'Anjou.
Catherine de Médicis commençait à prendre peur et se sentait menacée.
Les catholiques s’attendent à une révolte violente : ils décident de prendre les devants.
Il fallait agir vite et radicalement. C'est sans doute à ce moment qu'elle envisagea l'assassinat collectif des chefs protestants.
Le massacre
Dans la nuit du 23 au 24 août 1572, à Paris aux Tuileries, le Conseil du Roi prend une décision dramatique : Catherine de Médicis, reine mère, soutenue par le parti des Guise et par le frère du roi Henri d’Anjou, chef des catholiques, persuade l’influençable Charles IX, 22 ans, qu’il faut exterminer les chefs du parti huguenot.
En effet, ils leur fallaient obtenir son accord, indispensable pour avoir un soutien général et une couverture juridique. Pour cela, ils s'entretinrent avec lui vers minuit et usèrent d'arguments fictifs ou exagérés, dont le plus convaincant fut que les Huguenots le pensaient responsable et que sa personne était maintenant menacée.
Il n'en fallait pas plus pour le convaincre. Dans sa colère, il donna l'ordre de les tuer tous : « Tuez-les tous et qu’il n’en reste pas un seul pour me le reprocher. »
Catherine avait préparé une liste et on discuta du sort de chacun.
Le roi, pour donner son consentement, ne posa qu’une condition : que soient épargnés deux princes du sang, Henri de Navarre, qui est donc devenu son beau-frère, et Henri de Condé contre leur conversion.
Les autres -quelques dizaines- seraient massacrés.
Et c’est ainsi qu’est dressée, durant la nuit, la liste qui énumère les futurs condamnés de la Saint-Barthélemy : l’ensemble des chefs huguenots, rassemblés à Paris pour le mariage d’un des leurs, Henri de Navarre, futur Henri IV, avec Marguerite de Valois, soeur de Charles IX.
Le lendemain, jour de la Saint-Barthélemy - martyr mort écorché vif et patron des bouchers - la grande purge commence, effroyable massacre qui gagne bientôt la province et dure pendant quatre jours.
Le carillon de l’église de Saint-Germain l’Auxerrois, en face du Louvre, donne le signal.
Le quartier de Saint-Germain l’Auxerrois, où logent les gentilshommes protestants, est cerné par les troupes du Duc Henri de Guise : Coligny et ses compagnons seront les premières victimes.
Le jour n'était pas encore levé, quand une troupe menée par le duc de Guise alla le trouver dans sa chambre et le tua. Guise attendait en bas qu'on défenestrât le corps, qui fut alors livré à la cruauté populaire, et dépecé. Guise avait ainsi vengé la mort de son père (1563).
Au Louvre, ce furent au tour des proches d'Henri de Navarre, puis de la minorité protestante de Saint-Germain. Mais la cloche de l'église qui devait donner le signal sonna un peu trop tôt et nombre de protestant purent fuir. Les ordres de Catherine de Médicis furent rapidement dépassés par la folie populaire, et ce fut au tour de tout le peuple protestant d'être massacré et pillé. Henri de Navarre et Condé durent abjurer leur foi pour sauver leur vie.
Le mouvement, une fois lancé, ne s’arrêta pas aux chefs : à la découverte des cadavres, une folie meurtrière poussa le peuple parisien à se jeter contre tous les protestants. Munis de brassards blancs, des individus qui proclamaient qu’ils agissaient au nom de la vraie foi, pillaient et tuaient sans pitié, amputant et châtrant parfois les cadavres en guise de punition symbolique.
Le carnage dura trois jours et s’étendit en province, où, dès le 25, des envoyés avaient été expédiés munis d’instructions précises. D’une ville à l’autre, l’ordre du massacre est ou n’est pas suivi : à Meaux, 200 huguenots sont exécutés ; à Lyon, 700 ; à Bourges, à Orléans, les victimes se comptent aussi par centaines.
Le roi lança rapidement des appels au calme, mais resta enfermé au Louvre avec son entourage jusqu'au 26 août. Puis il alla au Parlement expliquer sa version des faits : qu'il avait dû ordonner la mort des chefs protestants pour empêcher une malheureuse conspiration : « Devant un danger éminent, et tel qu’il ne s’en était présentement pourvu par voie de fait que l’on rechercherait en vain les remèdes ordinaires de justice, (...) il a fallu user du glaive que dieu m’a mis dans les mains pour la conservation des bons et pour vengeance et extermination des méchants (...) sans garder une autre forme de solennité de justice. »
Mais rapidement les massacres se généralisaient dans tout le royaume, et ils devaient durer jusque pendant l'automne. Au total, il y eut plusieurs dizaines de milliers de morts, et plusieurs milliers d'exilés ou de convertis.
A Paris, la folie meurtrière cessa le 28 août, sur ordre du roi ; mais, en province, les meurtres continuèrent, sporadiquement jusqu’aux premiers jours d’octobre.
Heureusement, des régions entières restèrent à l’abri des violences : ainsi la Picardie, l’Auvergne, le Limousin ou le Périgord.
Les réactions extérieures :
En France, les protestants se ressaisirent et remontèrent une armée. Les guerres de religions avaient repris. L’événement, qui nous fait horreur aujourd’hui, suscita bien peu de réactions, en cette époque habituée aux violences.
Les massacres de la Saint-Barthélemy suscitèrent partout en Europe une vive émotion, c'était la première fois qu'un souverain réputé juste ordonnait le massacre d'une partie de son peuple. Les réactions prirent cependant des allures très différentes.
En Espagne, le très austère Philippe II ne parvint pas à retenir sa joie et fit chanter un Te Deum.
À Rome, le pape se félicita en frappant une médaille commémorative.
Dans les pays protestants, ce fut bien-sûr l'indignation, les princes allemands dirent leur consternation et les cantons suisses peinèrent à accueillir le flot de réfugiés.
En Angleterre, Élisabeth, bien que consternée, s'attacha à conserver ses relations avec la France, car les deux pays en avait besoin pour tenir tête à l'Espagne. En particulier, elle ne répondit pas aux appels à l'aide des protestants retranchés à La Rochelle.
Une bonne opération pour les catholiques
Du point de vue de la Couronne française, le meurtre des protestants s’avéra bénéfique : comme cela était le but, le parti huguenot sortit décapité du massacre.
Henri d’Anjou lui-même (Henri III), qui avait, avec la reine mère, inspiré le carnage, se retira quelques mois plus tard des affaires de la France, élu roi de Pologne, mais revint peu après au pouvoir, succédant sur le trône à son frère Charles, mort en 1574.
La revanche des protestants ne devait intervenir que plus tard, en 1589, avec l’avènement d’Henri IV, c’est-à-dire Henri de Navarre : encore que l’ancien chef des protestants français dut-il abjurer définitivement le protestantisme pour monter sur le trône de France.
Une question m’interpelle :
Le massacre de la ST Barthélémy a été perpétré par la foule catholique de Paris. C’est un fait acquit.
Pourtant, à cette époque, il n’existait pas de « listes » ou de bureaucratie recensant les protestants de la capitale. La seule personne à même de savoir si une autre était protestante, c’était son voisin.
Lui seul ou presque savait si la personne n’allait pas à la messe.
Pourquoi y a-t-il eu tant de morts ?
Alors, je me pose la question : pourquoi les bourreaux de la Saint-Barthélemy n’en auraient pas profité pour se débarrasser des voisins avec lesquels existaient de vieilles haines, de vieux conflits, des rancœurs ?
A suivre : LE MASSACRE DE LA SAINT-BARTHÉLEMY PAR L’IMAGE 2/2
Sources :
https://www.histoiredumonde.net/Guerres-de-religion-France.html
http://egliseetverite.canalblog.com/archives/2017/08/16/35586145.html
https://fr.wikipedia.org/wiki/Massacre_de_la_Saint-Barthélemy
Inscrivez-vous au site
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 28 autres membres